La maladie d’Alzheimer

Un peu d’histoire…

 

La maladie d’Alzheimer est une maladie neurodégénérative (perte progressive de neurones) incurable du tissu cérébral qui entraîne la perte progressive et irréversible des fonctions mentales et notamment de la mémoire. C’est la forme la plus fréquente de démence chez l’homme. Elle fut initialement décrite par le médecin allemand Alois Alzheimer en 1906.

 

Quelques chiffres :

Aujourd’hui, la maladie d’Alzheimer est la plus fréquente des maladies neurodégénératives car elle concerne environ 26 millions de personnes dans le monde et 850 000 Français. On recense, chaque année, 225 000 nouveaux cas, ce qui laisse à prévoir 1,3 millions de personnes atteintes en France en 2020. Si la maladie frappe le plus souvent des personnes âgées (près de 25% des plus de 80 ans), elle peut aussi survenir beaucoup plus tôt. On estime aujourd’hui en France à 20 000 le nombre de patients de moins de 65 ans atteints de la maladie d’Alzheimer.

 

Causes et facteurs de risque :

Les lésions responsables de la maladie

A ce jour, nous ne savons toujours pas ce qui cause la maladie d’Alzheimer. En revanche, il est établi qu’avant même l’apparition des premiers symptômes, les neurones sont affectés par deux types de lésions :

•LES PLAQUES AMYLOÏDES

Ces plaques sont formées par l’accumulation anormale d’une protéine dite « β-amyloïde ». En s’accumulant dans l’espace intercellulaire, ces dépôts amyloïdes vont causer la mort des neurones.

•LES DEGENERESCENCES NEUROFIBRILLAIRES

Elles correspondent à une accumulation à l’intérieur du neurone de filaments, dont le composant principal est la protéine tau. La dégénérescence neuro fibrillaire entraîne progressivement une désorganisation cellulaire puis la mort neuronale.

La mort des neurones s’opère avant tout dans l’hippocampe, une des régions essentielle de la mémoire et dans le cortex associatif, qui permet de relier entre elles différentes fonctions. La mort neuronale aura pour conséquence une atrophie de certaines zones cérébrales, c’est-à-dire une diminution du volume du cerveau.

Facteurs de susceptibilité génétique

Moins de 1% des malades présentent une maladie d’Alzheimer d’origine purement génétique. Cette forme rare se caractérise par une apparition très précoce des symptômes et par une transmission autosomique dominante (la moitié de chaque génération est atteinte).

Les formes sporadiques, c’est-à-dire non-familiales, de la maladie d’Alzheimer, semblent souvent comporter une prédisposition génétique. Le gène ApoE4 est le facteur de risque le plus important de la forme sporadique de la maladie d’Alzheimer. Des trois variantes du gène apoE (apoE2, apoE3 et apoE4), la variante apoE4 est associée à un risque accru de maladie d’Alzheimer. Cependant, la présence de l’ApoE4 n’est ni nécessaire, ni suffisante pour développer la maladie. Cela signifie qu’une personne qui n’est pas porteuse du gène apoE4 peut quand même développer la maladie d’Alzheimer et qu’un individu porteur du gène apoE4 n’en sera pas nécessairement atteint.

Facteurs de risques associés à la maladie d’Alzheimer

L’apparition de la maladie d’Alzheimer provient de l’interaction entre un terrain génétique et des facteurs de l’environnement. L’âge est bien sûr le principal facteur de risque avec une prévalence qui double tous les 5 ans, à partir de 65 ans (le risque est par exemple de 10% à 65 ans, il passe à 15% à 70 ans, 20% à 75 ans etc).

Mais on étudie actuellement d’autres types de facteurs de risques associés à la maladie d’Alzheimer : L’association entre facteurs de risques vasculaire et maladie d’Alzheimer est maintenant bien établie pour l’hypertension artérielle, l’hypercholestérolémie, le tabagisme et, dans une moindre mesure,

le diabète. L’alimentation (moins elle est équilibrée, plus il y a des risques), le manque d’activité physique et le manque de stimulation cognitive seraient possiblement associés à un risque augmenté de maladie d’Alzheimer.

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Des plaques séniles dans une coupe microscopique du cerveau.

Voici la comparaison entre un cerveau normal âgé (à gauche) et du cerveau d’un patient atteint de la maladie d’Alzheimer (à droite).

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Symptômes :

La maladie d’Alzheimer se caractérise par un début insidieux et une évolution progressive. Il existe une variabilité interindividuelle concernant l’ordre d’installation mais aussi l’intensité des différents troubles cognitifs chez les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. L’emplacement des lésions dans le cerveau explique la nature des symptômes que l’on voit apparaître au cours du temps :

La mémoire (l’amnésie)

Dans la majorité des cas, c’est la mémoire épisodique (souvenirs inscrits dans le temps et dans l’espace) qui est touchée en premier lieu. La personne aura donc du mal à enregistrer de nouvelles informations. Progressivement, elle présentera aussi des difficultés à se remémorer des informations apprises antérieurement. Malgré tout, la mémoire des évènements anciens reste longtemps bien conservée.

Les capacités de reconnaissance (agnosie)

Au cours de l’évolution de la maladie, il est possible de voir apparaître des difficultés d’identification des objets ou des visages. Cela s’explique par l’incapacité à mettre en relation ce qui est perçu et ce que nous avons appris alors que les fonctions sensorielles sont préservées.

Personnalité et comportement

Une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer peut devenir plus sensible

aux situations de stress. Chez certains patients, il existe une irritabilité augmentée ou des changements d’humeur plus rapide. Il peut également apparaître une plus grande passivité. La personne aura alors besoin de plus d’encouragements pour commencer une nouvelle activité.

 

Diagnostic :

Le diagnostic de la maladie d’Alzheimer en centre spécialisé est réalisé en deux étapes : il s’agit tout d’abord pour le médecin de rechercher l’existence de troubles des fonctions cognitives et/ou de constater l’existence d’un syndrome démentiel (voir critères ci-dessous).

Pour cela, il existe des tests simples permettant d’appréhender le fonctionnement de la mémoire, de l’orientation dans le temps et l’espace, de la faculté à s’exprimer… Si des anomalies sont détectées, il sera alors nécessaire de conduire une évaluation détaillée de l’ensemble des fonctions cognitives, réalisée par un neuropsychologue. Si cette procédure est longue, elle est néanmoins indispensable, le diagnostic de démence étant clinique.

Le deuxième temps du diagnostic consiste à rechercher l’origine de la démence et à renforcer l’hypothèse diagnostique. Pour cela, un certain nombre d’examens complémentaires est utile :

•L’IRM (Imagerie par Résonance Magnétique) permet de détecter une atrophie corticale et notamment des hippocampes (dont la taille est souvent diminuée dans la maladie d’Alzheimer). Elle permet par ailleurs d’éliminer d’autres causes de démences telle que la présence de lésions vasculaires, d’une tumeur cérébrale ou d’un hématome. Dans le cas ou un examen IRM est contre-indiqué (notamment pour les patients ayant un pacemaker), un scanner cérébral peut être prescrit.

•Des examens d’imagerie fonctionnelle peuvent être réalisés dans le cas ou le diagnostic étiologique de démence est plus incertain. La TEMP (Tomographie à Emission Mono Photonique) et la TEP (Tomographie par émission de positons) utilisent des marqueurs de la perfusion ou du métabolisme cérébral.

•Les dosages de la vitamine B12 et B9 ainsi qu’un bilan thyroïdien sont utiles pour exclure d’autres causes de démence.

•La réalisation d’une ponction-lombaire permet le dosage dans le liquide céphalo-rachidien de plusieurs protéines (tau, tau phosphorylées et β-amyloïde). Cet examen est demandé de plus en plus fréquemment car il constitue un appoint important à l’hypothèse diagnostique.

 

Traitements :

Les traitements spécifiques prescrits à ce jour dans le cadre de la maladie

d’Alzheimer sont des traitements symptomatiques. Ils agissent sur les

conséquences de la maladie et non sur la cause elle-même.

•Les inhibiteurs de l’acétylcholinestérase : L’acétylcholine est une molécule permettant la transmission entre certains neurones et joue un rôle dans la mémorisation. Ces traitements ont pour objectif de corriger le déficit en acéthylcholine que l’on observe dans le cerveau de patients atteints de maladie d’Alzheimer. Les effets de ces traitements sont modestes mais significativement supérieurs à ceux d’un placebo. C’est pourquoi il est recommandé de les prescrire en première intention, dès les stades débutants de la maladie.

•Un antagoniste du NMDA (mémantine) a montré des résultats contradictoires sur les symptômes de la maladie d’Alzheimer. Il agit sur le glutamate et aurait inefficacité sur la vigilance et l’attention.

Plusieurs molécules sont testées dans le cadre d’essais thérapeutiques en France. Parmi ces nouvelles pistes, il existe celle des inhibiteurs de la gamma-sécrétase qui empêche une protéine appelée APP de se transformer en peptide bêta-amyloïde, toxique pour les neurones. Un autre terrain de recherche s’intéresse à la protéine tau. L’objectif est de bloquer sa phosphorylation, autre phénomène associé à la maladie d’Alzheimer. Enfin, il existe les travaux menés sur l’immunothérapie. Les premiers tests sur l’homme ont montré des problèmes de tolérance clinique mais la recherche se poursuit.

 

La relation entre la LTP et la maladie d’Alzheimer :

Les effets cellulaires du peptide β-amyloïde au niveau de l’hippocampe peuvent être prévenus par une augmentation de l’AMPc intracellulaire.

Les désordres neuro dégénératifs qui caractérisent la maladie d’Alzheimer sont en grande partie attribués à l’accumulation du peptide β-amyloïde dans le milieu extracellulaire. Néanmoins, les mécanismes à l’origine des déficits cognitifs et comportementaux légers observés à un stade précoce de la maladie ne sont pas encore élucidés. En effet, les différentes données expérimentales obtenues sur des modèles animaux de la maladie d’Alzheimer ainsi que les observations réalisées chez l’homme n’ont pas permis de mettre en évidence une corrélation claire entre l’étendue des dépôts amyloïdes et le degré de l’atteinte cognitive. La perte de mémoire, par exemple, précède les altérations morphologiques observées expérimentalement. L’inhibition de la potentialisation à long terme (LTP), phénomène électro physiologique sur lequel semble reposer une partie des processus de mémorisation au niveau neuronal, suggère également la mise en œuvre de phénomènes biochimiques très précoces dans l’histoire

naturelle de la maladie.

 

Afin de préciser les mécanismes biochimiques et cellulaires induits précocement, les effets du peptide β-amyloïde de 42 acides aminés (Aβ1-42), le plus important en terme de potentiel cytotoxique, ont été étudiés sur un modèle expérimental de culture de neurones ou de tranche d’hippocampe de rongeur. Afin de se rapprocher d’une situation de pathologie débutante, des concentrations relativement faibles de peptide

β-amyloide ont été utilisées.


L’incubation des neurones d’hippocampe en présence de 1 µM de Aβ1-42 induit une chute rapide de l’activité basale de la protéine kinase A dont l’activité diminue de moitié en 3 heures. Cette phosphorylase est constituée de 2 sous unités catalytiques et de 2 sous unités régulatrices dont les interactions et le fonctionnement sont contrôlés par l’AMP cyclique. Seules les sous unités catalytiques dissociées sont actives et capables de phosphoryler le facteur de transcription CREB. Une stimulation par le glutamate, qui est le principal neurotransmetteur de l’hippocampe, entraîne une phosphorylation du CREB ainsi qu’un phénomène de LTP. Un prétraitement par le peptide Aβ1-42 inhibe cette phosphorylation. Cet effet inhibiteur peut lui-même être levé en présence de rolipram, un inhibiteur de phosphodiestérase  qui ralentit la dégradation de l’AMPc et donc augmente sa concentration cellulaire.

Pour analyser plus avant les réponses cellulaires correspondantes, les auteurs ont également réalisé une étude electrophysiologique au niveau de l’aire CA1 de l’hippocampe. Une concentration faible de peptide Aβ1-42 (200 nM) inhibe fortement le phénomène de potentialisation à long terme. L’addition de substances capables d’augmenter la concentration cellulaire en AMP cyclique comme un inhibiteur de phosphodiestérase ou un activateur de l’adényl cyclase antagonisait les effets du peptide β-amyloïde, effet bloqué par un inhibiteur direct de la protéine kinase A.

Ces travaux montrent que le peptide Aβ1-42 induit une inhibition rapide de l’activité de la protéine kinase A ainsi que du phénomène de LTP, étapes considérées comme importantes dans les processus de mémorisation. Ces données suggèrent aussi que des élévations modérées, non cytotoxiques de peptide Aβ1-42 pourraient altérer l’activité neuronale à un stade très précoce de la maladie, bien avant que des altérations histologiques soient visibles. Ces résultats posent également la question d’un bénéfice thérapeutique éventuel des composés capable d’augmenter l’AMPc neuronal chez les sujets à risque.

Effet du peptide β-amyloide (1-42) sur la potentialisation à long terme (LTP) des neurones de l’hippocampe. Interaction avec les modulateurs de l’activité protéine kinase A : forskoline (activateur de l’adénylyl cyclase), rolipram (inhibiteur de phosphodiestérases), H89 (inhibiteur de protéine kinase).
Aβ1-42 Inhibition de LTP
Aβ1-42 + forskoline Levée de l’inhibition de LTP
Aß1-42 + rolipram Levée de l’inhibition de LTP
Aβ1-42 + rolipram + H89 Inhibition de LTP

Publié en Octobre 2002

Auteur : G. Hamon – Successful Aging, Boulogne-Billancourt

Références : Vitolo OV, Sant’Angelo A, Costanzo V, Battaglia F, Arancio O and Shelanski M. Amyloid β-peptide inhibition of the PKA/CREB pathway and long-term potentiation: reversibility by drugs that enhance cAMP signalling. Proc Natl Acad Sci NY, 2002;

Grâce à l’article ci-dessus, nous comprenons que la maladie d’Alzheimer est principalement due à l’accumulation du peptide β-amyloïde dans le milieu extracellulaire empêchant ainsi les neurones de fonctionner normalement ce qui entraleur mort. Le peptide β-amyloïde fait baisser l’activité de la protéine kinase A essentielle dans le mécanisme de la LTP. La phosphorylation de la protéine CREB nécessaire à la LTP via le glutamate est empêchée. Tout ceci provoque une baisse de la LTP et donc une perte de la mémoire évidente et inchangeable.

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